Assemblées annuelles de la Banque mondiale et du FMI

9 octobre 2015 > 11 octobre 2015, Lima

La Ferdi a organisé un événement parallèle sur « la vulnérabilité climatique et l'allocation des fonds d'adaptation ».

A l’occasion des Assemblées annuelles de la Banque mondiale et du FMI qui se sont déroulées à Lima (Pérou) du 9 au 11 octobre, la Ferdi a organisé un événement parallèle sur « la vulnérabilité climatique et l’allocation des fonds d’adaptation ».

Cet évènement a eu lieu le vendredi 9 octobre de 15h00 à 16h30 (Banco de la Nacion, Room 113, 2e étage) 

Compte-rendu

Le panel a été l’occasion de débattre de comment allouer aux pays en développement les crédits d’adaptation au changement climatique. Il s’est également agi de discuter de  la pertinence d’un indice de vulnérabilité au changement climatique en tant que critère principal d’allocation et de la manière dont un tel modèle d’allocation utilisant cet indice pourrait être mis en œuvre.

Le panel a réuni plusieurs ministres de PMA vulnérables au changement climatique, des représentants d’institutions de financement du développement et des chercheurs.

La session fut introduite et modérée par Patrick Guillaumont qui a rappelé en préambule les trois principales questions sur le financement du changement climatique : comment mobiliser suffisamment de ressources? Quel partage de ces ressources entre adaptation et compensation? Quelle allocation entre les pays?

Or, les règles en matière d’allocation des fonds d’adaptation restent encore à être précisées.

Pour Patrick Guillaumont, si les enjeux liés à l’adaptation rejoignent ceux du développement et ceux de l’atténuation du changement climatique, il n’en demeure pas moins :

i) que les financements sont distincts, ce qui justifie que l’on se penche sur la question de l’allocation de ces financements de façon différenciée,

ii) qu’il existe une spécificité de l’adaptation, essentiellement liée aux besoins des pays vulnérables au changement climatique, par rapport à l’atténuation dont l’objectif est la production d’un bien public mondial.

En conséquence, les priorités diffèrent entre les deux pans de la lutte contre le changement climatique, avec l’efficacité pour l’atténuation et l’équité pour l’adaptation.

Pour cette dernière, la Ferdi propose un indicateur permettant d’identifier la vulnérabilité physique au changement climatique que Patrick Guillaumont a présenté avec des estimations par groupes de pays, ainsi que des estimations correspondantes du modèle d’allocation (voir le document de travail Mesurer la vulnérabilité au changement climatique pour allouer le financement de l’adaptation ).

Nancy Birdsall (Présidente du Center for Global Development) a rappelé le délicat arbitrage entre le droit des pays pauvres exposés à des problèmes climatiques dont ils ne sont pas responsables et le besoin d’efficacité des donneurs. L’allocation des fonds devrait être basée sur la vulnérabilité physique au changement climatique et les capacités des pays d’y faire face, soit la vulnérabilité économique et institutionnelle, d’autant que les pays les plus pauvres comptent souvent parmi les plus menacés par les conséquences du changement climatique. Pour les pays en faible capacité de gérer le problème et les fonds auxquels ils auraient droit, un intermédiaire neutre devrait apporter un support. Un fonds spécial de renforcement de capacité spécifique devrait être créé.

Le Ministre de l’Économie et des Finances du Niger Saidou Sidibé a pu évoquer la stratégie de son pays en matière de développement et de nutrition en soulignant le besoin de soutien financier de son pays et l’arbitrage auquel il fait face entre une énergie propre mais onéreuse et une énergie plus polluante mais bien meilleure marché et dont il est encore délicat pour son pays de s’affranchir.

Le Secrétaire d’État aux Finances publiques d’Haïti Ronald Décembre a également pu faire mention des grands défis auxquels fait face son pays en raison de la grande vulnérabilité d’Haïti au dérèglement climatique.

Joachim von Amsberg, Vice-Président de la Banque mondiale pour les financements concessionnels et les partenariats, a estimé que l’expérience d’IDA en matière d’allocation est précieuse pour les débats actuels, notamment pour choisir au mieux le poids accordé au niveau de revenu et à la performance (mesurée par le CPIA). Selon J. von Amsberg, la formule d’allocation de l’IDA a permis de créer un climat de confiance auprès des bailleurs de fonds soucieux d’efficacité. La formule est améliorable mais il juge nécessaire de maintenir une certaine stabilité dans l’affectation des ressources. Enfin, il estime que les financements développement et adaptation sont intimement liés et ne doivent ainsi pas être distingués. 

Pour Arnaud Buissé, sous-directeur au Trésor français et Administrateur du Fonds vert, il est effectivement compliqué de distinguer les enjeux développement et adaptation, même si un indicateur d’identification de vulnérabilité au changement climatique est utile et pertinent. Il est en effet important d’objectiver la vulnérabilité, notamment en l’absence de définition précise du concept de vulnérabilité au changement climatique. L’allocation des fonds disponibles, dont le chiffre de 100 milliards de dollars est très totémique et ne correspond pas vraiment à la quantité de ressources nécessaire et à allouer, doit bénéficier d’une méthode d’allocation transparente et pertinente, le PVCCI contribue utilement à ce débat.

Benedict J. Clements, chef de division au département des affaires fiscales du FMI, reconnait également l’utilité d’un indicateur comme le PVCCI pour nourrir le débat, parmi beaucoup d’autres dimensions que les gouvernements doivent prendre en compte dans leur stratégie de développement et de lutte contre le changement climatique, comme par exemple : les coûts économiques, la part allouée à la question climatique dans le budget de l’Etat, etc., soit les éléments financiers de la question.

Gaël Giraud, Chef économiste de l’Agence française de développement, a pour sa part estimé que nous avions besoin de critères comme le PVCCI pour allouer concrètement les fonds disponibles qui doivent s’additionner à l’aide au développement déjà disponible. Il en particulier a trouvé approprié de l’usage d’une moyenne quadratique dans la construction de l’indice pour faire ressortir la vulnérabilité spécifique de chaque pays. L’indice est bien sûr améliorable, notamment en tenant compte de la grande difficulté de localiser avec précision et à l’avance la survenue probable des phénomènes climatiques ainsi que leur intensité, qui souvent se mesure plutôt régionalement que nationalement. Enfin, Gaël Giraud s’interroge sur quelles sont, d’après les auteurs, les implications du classement de la Chine en tant que pays vulnérable au changement climatique.

Idrissa Thiam, Ministre Conseiller du Président de Guinée, a souligné combien son pays était vulnérable au changement climatique et comment les projets hydroélectrique contribuent à l’atténuer.

Le commissaire à la CEMAC Paul Tasong a enfin rappelé qu’il est indispensable d’indemniser ceux qui, au niveau local, font les efforts nécessaires à la préservation et la promotion de la biodiversité. 

Patrick Guillaumont a conclu en rappelant le caractère exploratoire de l’indice proposé tout en soulignant la difficulté de trouver un consensus si l’on veut introduire trop d’éléments économiques. Raisonner à travers un indice uniquement physique laisse aux pays la liberté de mener les politiques de lutte contre le changement climatique qu’elles entendent et leur offre en ce sens une information utile.