Valéry Giscard d’Estaing (1926-2020), président d’honneur de la Ferdi

Dès sa création en 2003 le conseil d’administration de la Ferdi a pu s’enorgueillir d’avoir comme président d’honneur l’ancien grand Président de la République (1974-1981), devenu plus tard un exceptionnel Président de Région (1986- 2004). Son lien avec la Ferdi et précédemment avec le Cerdi était profond. À maintes reprises il s’est manifesté.

D’abord en apportant un soutien, accompagné de celui des autres collectivités territoriales, à l’installation du Cerdi dans de nouveaux locaux et à l’extension de ceux-ci, et en ciblant pour partie ce soutien sur l’analyse des transformations de l’économie chinoise dont, il y a un quart de siècle, il mesurait pleinement les enjeux. Ensuite et surtout en aidant de façon décisive à la création en 2003 de la Ferdi comme fondation reconnue d’utilité publique, les collectivités territoriales s’associant à nouveau pour contribuer à la dotation requise. Le premier conseil d’administration de la Ferdi lui proposa d’en être le président d’honneur, ce qu’il fut de 2003 à aujourd’hui.

Le soutien de Valéry Giscard d’Estaing au Cerdi et à la Ferdi fut loin de se limiter à celui du Conseil régional qu’il présidait. Le Président s’intéressait personnellement aux activités du Cerdi et de la Ferdi, les faisant bénéficier de ses relations, par exemple en y amenant comme conférenciers des personnes illustres qu’il recevait en Auvergne comme Henry Kissinger. Et s’il arrivait au Cerdi ou à la Ferdi de recevoir des hôtes de marque comme ce fut le cas en 2002 avec Abdoulaye Wade après que celui-ci fût élu Président de la République du Sénégal, il apportait tout son concours et son prestige pour faire de la visite un événement international. Je dois aussi dire qu’en tant que président de la Ferdi, j’ai eu en de multiples occasions et jusqu’au début du mois de février dernier la chance de bénéficier de ses conseils en même temps que de sa vision du monde quand régulièrement je venais le tenir au courant des activités de notre fondation dont il restait le président d’honneur.

Les chercheurs en économie du développement se souviendront d’ailleurs des grandes initiatives prises par le Président Giscard d’Estaing durant son septennat pour améliorer les relations internationales et notamment la coopération Nord-Sud. Tel fut le cas de la création du G5 devenu maintenant le G7 et dont la nature a profondément changé depuis son origine, puisque la rencontre, initialement voulue informelle, entre les responsables des cinq principales puissances mondiales est devenue non seulement une grande rencontre internationale, mais aussi un cadre permanent de discussion des problèmes mondiaux, tels qu’aujourd’hui le moratoire de la dette des pays pauvres. Moins connue , car ayant eu moins de suite, mais significative d’une démarche pragmatique est la  Conférence sur la coopération économique internationale tenue à Paris en deux courtes sessions (décembre 1976 et avril 1977) et que justifiait alors le blocage des grandes conférences internationales qui s’étaient déployées après le premier choc pétrolier : tenue à huis clos avec seulement 27 délégations dont une forte majorité de pays en développement (et une seule délégation pour la Communauté européenne) la Conférence permit de faire progresser les négociations engagées dans de plus vastes enceintes. C’est de nouveau le Président Giscard d’Estaing qui proposa d’accueillir et d’organiser à Paris la première Conférence des Nations unies sur les PMA, laquelle se tint après son départ en septembre 1981 et qui fut suivie par une autre tous les dix ans, deux fois à Bruxelles, une fois à Istanbul en 2011, la prochaine à Doha et auxquelles la Ferdi se fait un devoir de contribuer. Enfin lorsqu’au tournant des années quatre-vingt  Valéry Giscard d’Estaing animait une réflexion internationale sur l’unification monétaire européenne, dont il fut  un promoteur décisif, il ne manquait pas d’en examiner les conséquences pour les pays en développement ayant des liens particuliers avec l’Europe. Je me souviens qu’ainsi à une réunion tenue à Athènes de son groupe de réflexion il nous invita en ménage à venir exposer devant Helmut Schmidt et lui quelles pourraient en être les implications pour les pays africains, thème qui alimente encore de vifs débats, ainsi que des travaux de la Ferdi.

Ce ne sont là que quelques exemples pour illustrer que le président d’honneur de la Ferdi avait une vision extraordinairement large et perspicace de l’évolution économique mondiale. Cette vision inspirait son action et demeure une source d’inspiration pour notre fondation. 

Patrick Guillaumont