La confiance numérique : une condition à l’émergence de l’Afrique

29 novembre 2023 > 30 novembre 2023, Abidjan et en ligne

Conférence organisée par la Ferdi les 29 et 30 novembre 2023 en partenariat avec l'École nationale supérieure de statistique et d'économie appliquée (ENSEA) d'Abidjan. Sous le Haut-Patronage de Madame Nialé Kaba, Ministre de l’Économie, du Plan et du Développement de la Côte d’Ivoire.
Informations pratiques

ÉVÉNEMENT HYBRIDE

29 novembre, de 9h30 à 17h30 (heure Abidjan)
30 novembre, de 10h00 à 12h (heure Abidjan)

Lieu
Amphithéâtre de l'ENSEA
ENSEA - École nationale supérieure de Statistique et d'Économie appliquée
Avenue des Grandes Écoles
Cocody Abidjan


Connexions zoom 


Aucune inscription n'est exigée. 

La Chaire Confiance Numérique de la Ferdi organise cette conférence internationale pour partager les principales conclusions de ses travaux accomplis ces quatre dernières années et ayant abouti à la rédaction par Jenny Aker (Tufts University, Ferdi) et Joël Cariolle (Ferdi) du livre « Mobile phones and development in Africa: does  the evidence meet the hype ? », publié aux éditions Palgrave Macmillan.

Par la publication de ce livre, la Chaire entend réaffirmer sa conviction que la confiance numérique est une condition de l’émergence africaine, lorsque les acteurs publics et privés sont en mesure de s’approprier les technologies numériques pour satisfaire les besoins de la population et promouvoir une dynamique endogène de développement. Cette confiance repose principalement sur l’intégrité, la taille et la qualité du réseau de télécommunications, ainsi que sur la fiabilité du partage d’information. Ainsi, la diffusion des technologies numériques, leur fiabilité, et leur application à grande l’échelle, témoins d’une confiance numérique accrue, conditionnent l’impact du numérique tant sur le bien-être des populations, notamment des femmes, sur le développement des capacités productives, que sur le bon fonctionnement des institutions et administrations publiques.

La conférence vise à contribuer aux débats sur le processus de digitalisation du continent africain et à formuler des recommandations sur les moyens de favoriser le passage à l’échelle de certaines innovations numériques pour que le processus de digitalisation impulse une dynamique favorisant l’émergence dans la région ouest africaine. Les échanges lors de la conférence combineront l’apport de connaissances académiques récentes sur le sujet et l’expérience des praticiens, tant publics que privés.

Contexte

Au cours des vingt dernières années, le téléphone mobile est devenu un lien vital avec le « monde extérieur ». En offrant un accès à des services omniprésents tels que WhatsApp, l'e-mail et les réseaux sociaux comme Twitter, Instagram et TikTok, le téléphone mobile est devenu un objet dont il est difficile de se passer ou juste de se séparer. Alors que nous utilisions autrefois les lignes téléphoniques fixes pour communiquer avec des amis et que nous nous rendions physiquement en magasin pour payer nos courses en espèces, désormais nous communiquons, accédons à des informations, achetons des biens et services, ou trouvons du travail, à distance et d'un simple toucher d'écran.

Ainsi, dans les pays industrialisés ayant un secteur privé formalisé, des infrastructures développées et des administrations publiques fonctionnelles, ces avancées technologiques représentent des innovations « de confort », améliorant leur fonctionnement. Dans les pays à faible revenu et plus particulièrement dans leurs zones rurales, la diffusion des technologies numériques joue un rôle davantage structurant. C’est particulièrement le cas de la téléphonie mobile qui, dans certaines zones reculées, constitue souvent la première infrastructure de communication moderne. 

Dans le monde, il y a maintenant plus de 4,9 milliards d'abonnés au téléphone mobile, dont 1,7 milliard en Asie, 460 millions en Amérique latine et environ 495 millions en Afrique subsaharienne (GSMA, diverses années). L'adoption a eu lieu dans des milieux socio-économiques et politiques différents, dans des pays aux langues multiples, avec différents fournisseurs de services de téléphonie et d’internet mobile et, dans de nombreux cas, sans investissement substantiel du secteur public. 

Pourquoi un tel engouement ? Tout simplement parce que le téléphone mobile (basique ou intelligent) est un dispositif de communication, reliant les individus entre eux, donnant accès aux informations, aux marchés et aux services, à des coûts nettement inférieurs aux alternatives traditionnelles (Aker et Mbiti 2010, Aker et Blumenstock 2014, Aker, Ghosh et Burrell 2016). En Tanzanie, les agriculteurs d'Arusha peuvent envoyer un SMS pour connaître les prix du maïs et du tournesol dans la capitale, à dix heures de bus. Au Niger, la technologie du téléphone mobile a réduit la dispersion des prix sur les marchés des céréales et du niébé, principalement en améliorant la circulation de l'information et l'arbitrage spatial (Aker 2010). Au Nigeria, les travailleurs journaliers peuvent appeler des contacts au Bénin pour se renseigner sur les opportunités d'emploi sans faire le trajet coûteux de 40 dollars. Au Kenya, l'introduction de l'argent mobile a permis aux ménages affectés par les chocs d'accéder aux transferts d'argent et de lisser leur consommation (Jack et Suri 2014). La multiplication d’innovations numériques dans tous les secteurs de l’économie peut induire une dynamique de développement endogène et de réduction des inégalités sociales, économiques, mais aussi de genre. 

Pourtant, malgré ce potentiel, les preuves de ces 'réussites' se limitent à des secteurs, pays et technologies spécifiques, et à plus grande échelle leur impact sur le bien-être et les moyens de subsistance des individus restent encore à démontrer (Abate et al, 2023). Par ailleurs, le processus de digitalisation, parce qu’il repose largement sur les dotations en capital physique et humain des pays et populations, peut être un facteur d’aggravation d’inégalités préexistantes et persistantes, telles que les inégalités spatiales entre zones urbains et zones rurales ou les inégalités de genre (Alozie et Akpan-Obong, 2016).

La question du rôle de la technologie de l'information dans le développement reste donc posée. Si un nombre croissant de recherches suggère que les téléphones mobiles font exactement ce qu'ils avaient promis - réduire les coûts de recherche, augmenter l'accès à l'information et aux services financiers, et rendre les marchés plus efficaces, les initiatives du secteur public et privé n'ont pas totalement répondu aux attentes, surtout dans les zones rurales (Abate et al, 2023) ou en termes d’émancipation et d’autonomisation des femmes (Alozie et Akpan-Obong, 2016). 

L’objectif de cette conférence est donc de dresser un bilan du processus de digitalisation pour le développement sur le continent africain, en proposant, dans une première session, un panorama économique général à travers la présentation du livre « Mobile phones and development in Africa: Does  the evidence meet the hype ? » co-écrit par Pr. Jenny C. Aker (Tufts University, Ferdi) et Joël Cariolle (Ferdi), et publié chez Palgrave McMillan. Un deuxième panel viendra compléter et préciser le propos en questionnant le potentiel et du processus d’innovation numérique pour l’entreprenariat et l’entreprise africaine. Ensuite, la question essentielle de la mobilisation des recettes publiques et de la digitalisation des outils de collecte et de gestion sera l’objet d’un troisième panel. Enfin, la conférence élargira la problématique de la digitalisation à la sphère socio-politique, par un dernier panel dédié à l’accès à l’information par internet et au risque que pose la mésinformation et la désinformation pour le fonctionnement des institutions démocratiques africaines. 

Programme

Mercredi 29 novembre
9h30-17h30 (heure Côte d'Ivoire - GMT)

09:30-10 :00
Ouverture

  • Hugues Kouadio, Directeur de l’ENSEA d’Abidjan 
  • Patrick Guillaumont, Président de la Ferdi 
  • Niale Kaba, Ministre de l’Économie, du Plan et du Développement de la Côte d’Ivoire


10h-12h00
Présentation du livre Mobile phone and Development in Africa : Does the Evidence meet the hype? par les auteurs Jenny Aker, Professeur à Tufts University, Senior Fellow Ferdi, et Joël Cariolle, Chargé de recherche Ferdi.

Discussion : 

  • Kibrom Abay, Senior Research Fellow, International Food Policy Research Institute (IFPRI)
  • Marcelin Cissé, Directeur général, Ministère de l'Économie, du Plan et du Développement de la Côte d'Ivoire
  • Antonia Gleizes, Venture Partner Marketing, Janngo
  • Uyoyo Edioso,  Expert principal ICT4D, Banque africaine de développement (BAD)
  • Abossé Akue-Kpakpo, Directeur de l'Économie numérique, Commission de l'UEMOA

Modération : Lewis Landry Gakpa, Enseignant-chercheur à l'ENSEA

14:00-15:30
L'innovation numérique au service de l’entreprenariat et de l'entreprise africaine

Discussion :

  • Didier Amissah, Directeur général, Agristore   
  • Niffone Jacqueline Dabou, Directeur de l’Inclusion financière, Banque centrale des États de l'Afrique de l'Ouest (BCEAO)
  • Steve Dakayi, Co-Fondateur, Betastore
  • Elfried Didehia, Directeur des Services financiers, Djamo
  • Alphonse Noah, Maitre de conférences à l'Université de Limoges

Modération : Lambert N’galadjo Bamba, Conseiller spécial aux Ministères Économie et Finances de Côte d'Ivoire, Professeur à l'Université Félix-Houphouët-Boigny / UFRSEG - CIRES 

16:00-17:30
Mobilisation des recettes publiques et digitalisation

Discussion :

  • Arthur Ahoussi,  Directeur général adjoint du Trésor et de la Comptabilité publique, Direction générale du Trésor et de la Comptabilité publique de Côte d’Ivoire
  • Thomas Cantens, Chef de l’Unité Recherche et politiques, Organisation mondiale des douanes (OMD), et projet DATAFID
  • Nafy Silue Coulibaly, Directrice Orange Middle-East-Africa (OMEA) de la zone Côte d’Ivoire, Burkina Faso et Libéria
  • Hugues Kouadio, Directeur de l’ENSEA d’Abidjan 
  • Grégoire Rota Graziosi, Professeur des Universités, Centre d'études et de recherches sur le développement international (Cerdi-UCA), et Directeur de programme Ferdi

Modération : 

  • Alban Ahouré, Professeur à l'Université Félix-Houphouët-Boigny, Directeur de la CAPEC, et Université Internationale de Côte d’Ivoire 

Thursday 30 November 2023

Jeudi 30 novembre 2023
10h00-12h00 (Heure Côte d'Ivoire - GMT)

10:00-12:00
Technologie d'information ou de mésinformation? Internet et démocratie en Afrique sub-saharienne
Présentation de l’article (Mis-)information technology : Internet use and perception of democracy in Africa par Yasmine Elkhateeb, Université Paris 1 et Université du Caire. Co-auteurs : Joël Cariolle, Ferdi et Mathilde Maurel, Université Paris 1

Discussion :

  • Hilda Barasa, Senior Policy Advisor, Tony Blair Institute 
  • Ganiath Bello, Journaliste, Elles Médias 
  • Martial Foucault, Professeur à Sciences Po Paris, Directeur du CEVIPOF
  • Babacar Ndiaye, Directeur de la Recherche et des publications, Wathi

Partenaires

  • République de Côte d'Ivoire
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