Un large consensus émerge dans la littérature à propos de la vulnérabilité structurelle économique et environnementale forte des Petits Espaces Insulaires en [PEIs]. Cette vulnérabilité découle de multiples handicaps majeurs : (i) des caractéristiques géographiques (petite taille, isolement, enclavement, exposition à des chocs exogènes, écosystèmes fragiles, …), (ii) le contexte historique (forte dépendance par rapport à l’extérieur, liens étroits avec les anciennes puissances coloniales, …), (iii) le contexte social (intensité faible et volatilité forte du capital humain, insécurité, …) (iv) la structure économique (un manque d’économies d’échelle, étroitesse des marchés locaux, faible diversification des activités économiques, coûts de transaction élevés, …).
Ces limites structurelles, conjuguées au phénomène d’érosion des préférences commerciales résultant du processus de libéralisation multilatérale, rendent impossible toute stratégie de développement basée sur l’industrialisation. Très tôt, le tourisme est apparu comme la solution la plus pertinente pour instaurer une croissance dynamique et permettre un développement soutenable des PEIs. Cette proposition s’appuie sur plusieurs éléments : (i) le tourisme n’est pas une activité de haute technologie et n’exige donc pas le recours à un capital humain hautement qualifié, (ii) les économies insulaires ont généralement un avantage comparatif dans ce domaine (des handicaps de départ, comme l’isolement, la distance et l’insularité, peuvent constituer en définitive des atouts), et (iii) de bonnes perspectives de croissance économique au niveau mondial dans ce secteur. Par ailleurs, plusieurs études récentes ont mis en évidence un lien positif significatif entre les recettes touristiques et la croissance du PIB pour les Petites Economies Insulaires Touristiques [PEITs]. De plus, en dépit d’une vulnérabilité structurelle économique avérée, peu d’entre elles font partie de la catégorie des pays les moins avancés. Ceci pourrait suggérer que la stratégie délibérée de la spécialisation touristique encourage la construction d’une capacité de résilience.
Toutefois, la spécialisation touristique révèle également certains signes d’instabilité et de vulnérabilité, lesquels affectent le développement soutenable pour ces petits territoires à moyen terme. Premièrement, nombre de crises et de menaces imprévisibles peuvent impacter la soutenabilité du secteur dans le cadre spécifique des petites économies insulaires. Deuxièmement, la mondialisation a rendu la demande touristique mondiale de plus en plus volatile, ce qui impose aux destinations touristiques de s’adapter en permanence. Aussi, pour faire face à la concurrence croissante, celles-ci doivent élaborer des stratégies pour construire leur attractivité territoriale. A ce titre, fédérer l’ensemble des parties prenantes des milieux socio-économiques et culturels locaux apparaît comme une condition préalable. Cependant, réunir tous ces acteurs autour d’un projet commun est un défi particulièrement difficile à relever dans ce type d’économies, encore marquées les stigmates du passé colonial et la toute-puissance des lobbies. Dernièrement, l’activité touristique, elle-même, peut être à l’origine de sa propre destruction. En effet, le tourisme porte souvent atteinte à l’environnement naturel et culturel du pays hôte. Le succès d’une destination peut conduire à son propre déclin quand le comportement et le nombre de touristes perturbent l’équilibre écologique et culturel pourtant à la base de son avantage comparatif.
Par conséquent, l’examen en profondeur des liens existant entre la spécialisation touristique et la vulnérabilité s’avère crucial. De manière plus précise, « la stratégie touristique pourrait-elle être un facteur de développement durable pour les PEIs ? ». L’objectif de cette conférence est justement d’apporter des éléments de réponse à la fois analytique, empirique et politique à cette question fondamentale.
La conférence a donc pour ambition d’aborder les sujets suivants (mais ne se limite pas) :