Émigration, capital humain et développement : enseignements des recherches récentes menées à l’IRES

Les liens qui unissent la migration internationale et le développement économique des pays d’origine ont été abondamment étudiés dans la littérature récente. La base de données RePEc-IDEAS sur les publications en sciences économiques révèle que le pourcentage d’articles abordant la migration dans les recherches axées sur l’économie du développement et les inégalités de revenus est passé de 1,0 à 1,7 % entre 1985 et 2015 ; le pourcentage d’articles abordant le développement dans les recherches axées sur les causes et les conséquences des migrations est passé de 10 à 17 % sur la même période (voir Clemens et al., 2014). Si l’émigration non qualifiée est généralement perçue comme bénéfique pour les pays en développement, l’impact de l’émigration qualifiée (ou fuite des cerveaux) est plus ambigu. L’absence de données fiables sur la structure par niveau d’éducation, par genre et par pays d’origine des migrations internationales a longtemps freiné les progrès académiques. Depuis peu, de nouvelles bases de données ont été développées, ce qui a permis l’émergence d’une nouvelle littérature empirique et quantitative sur la thématique de l’émigration qualifiée et sur ses liens avec l’évolution de la distribution mondiale du revenu.Sur les 10 dernières années, l’IRES a largement contribué à l’essor de cette nouvelle littérature. Nos recherches ont porté sur la production de nouvelles mesures harmonisées d’émigration par niveau d’éducation et par genre, sur l’analyse des déterminants de l’intensité et de la composition des flux migratoires, et sur l’impact de ces flux pour les pays d’origine et pour l’économie mondiale. Cet article présente une synthèse partielle des résultats de recherche obtenus. La section 2 porte sur les mesures et déterminants de la fuite des cerveaux ; elle présente plusieurs faits stylisés sur la distribution des taux d’émigration des qualifiés au début du XXIe siècle. Ensuite, l’impact de la fuite des cerveaux sur les performances des pays en développement est discuté dans la section 3. À l’aide de projections migratoires pour le reste du XXIe siècle, la section 4 défend l’idée que la thématique de la fuite des cerveaux restera une thématique majeure dans les décennies à venir, tant du point de vue des pays d’origine que des pays européens. Enfin, la section 5 conclut. 
Citation

Docquier, F. (2016). Emigration, capital humain et développement: enseignements des recherches récentes menées à l'IRES, Reflets et Perspectives de la Vie Economique, LV(1): 73-87.